XALÉ. Colorer les blessures au Sénégal

LM Fiction de Moussa Sene Absa, Sénégal / Côte d’Ivoire, 2022
Sortie France : 3 avril 2024

Les cinéastes sénégalais aiment explorer les blessures des femmes pour les sublimer. Ainsi Moussa séné Absa conclut une trilogie sur la condition des Sénégalaises avec Xalé, 2022, apprécié dans des festivals internationaux, distribué avec succès dans son pays. Après Tableau Ferraille, 1997, qui aborde la polygamie, la stérilité, le pouvoir politique, il signe Madame Brouette, 2002, qui évoque la solitude, l’amour, la trahison. Après quelques documentaires, la production d’une série télé, le réalisateur esquisse avec Xalé, une « ode à l’innocence de la jeunesse à travers à la fois les rêves les plus audacieux et la fragilité de la vie ».

Suite à une scène violente où un homme est assassiné, le récit se présente comme un flashback pour remonter aux causes du meurtre. On suit le destin de deux femmes. Fatou, coiffeuse altière, est mariée contre son gré à Atoumane à la mort de sa grand-mère. Elle refuse de consommer le mariage en cultivant son attirance pour Nandité, le propriétaire d’un taxi qui emploie Atoumane. Ce dernier, frustré, convoite alors sa nièce Awa.
A 15 ans, elle travaille dans le salon de coiffure de sa cousine Fatou, tandis que son frère jumeau, Adama, économise pour s’embarquer en clandestin en France. Méprisant les conseils de prudence de son entourage, il va tenter le voyage quand le destin de sa sœur bascule sous les assauts de Atoumane. Ce dernier sera banni mais Awa, enceinte, veut élever seule sa fille qui grandit et découvrira plus tard un père inattendu.

Moussa Sene Absa soulève la question du viol au sein du cercle familial. Un drame souvent occulté dans une société où les filles sont précoces, les familles élargies dans la promiscuité des quartiers populaires.  » C’est dans un tel contexte de crise des valeurs que le film prend tout son sens. Non pour faire la morale mais pour démêler tous ces nœuds qui étouffent « , indique le réalisateur en basant son récit sur des enquêtes de terrain. Il filme avec respect des personnages dignes, même le héros destructeur, Atoumane, qui se sent mal aimé.  » Il lâche prise. Il est aussi victime de la société « , compatit Moussa Sene Absa.
Les femmes fières qui affrontent leur destin sont valorisées dans des tenues soignées. Fatou s’épanouit avec son amoureux tandis que Awa se projette dans l’éducation de sa fille jusqu’à écarter radicalement le père qui revient comme une menace au terme de son bannissement par les sages. « Xalé se veut un film palpitant où tout se joue sur la force des acteurs et la sobriété de la mise en scène », estime Moussa Sene Absa. « Je veux porter un film qui rompt avec une certaine forme de narration et de contenu. » Et comme souvent, le corps de son film est un flashback.

 

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Author: Michel Amarger

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