Animalia : des êtres et des âmes au Maroc

LM Fiction de Sofia Alaoui, France /Maroc, 2023
Sortie France : 9 août 2023
Distribution France : Ad Vitam

L’aspiration à l’irrationnel, à la science-fiction comme projection et orientation des destins, sert d’envol et d’envolée à Sofia Alaoui. Cette réalisatrice franco-marocaine, soucieuse de participer au renouveau du cinéma maghrébin, s’est offert un joli doublé au Festival de Sundance avec deux Grand Prix du Jury, l’un pour son film court, Quand les bêtes meurent, en 2020, et l’autre pour son premier long-métrage, Animalia, en 2023.
C’est un bel élan pour la cinéaste, née à Casablanca, qui a grandi entre le Maroc et la Chine, avant de se former au cinéma à Paris puis s’activer comme consultante sur des scénarios. Revenue au Maroc dès 2017, elle a créé sa propre structure de production [Jiango Films, NDLR] pour réaliser des films courts, documentaires et fictions, avant de développer un ton plus personnel et onirique, accompli dans Animalia.

L’héroïne, Itto, une Berbère de milieu modeste, âgé de 22 ans, vit avec Amine chez ses beaux-parents. Elle attend un enfant et habite la grande maison de sa riche belle-famille où plane comme une menace. Quand ses occupants quittent le logis pour un déplacement, Itto se retrouve seule. Le brouillard se lève, l’atmosphère devient trouble. La jeune femme se lance dans la campagne où tout semble magnétique. Elle progresse dans des espaces désertés où les rencontres sont fuyantes, où l’argent n’a plus de valeur. Un homme à triporteur, l’épaule. Itto semble échapper à un monde convenu pour mieux s’accomplir.
Dès les premières images, la nature paraît pénétrée par le surnaturel. Les éléments ont des résonances mystiques. « Le monde physique repose sur un monde plus complexe », énonce l’un des protagonistes. Comme dans Quand les bêtes meurent, le court-métrage précédent de Sofia Alaoui, qui lui a servi de pilote, la mise en scène immerge le spectateur dans une réalité où affleure le surnaturel. Le poids des traditions, des communautés différentes, de la richesse, de la religion, de la foi même, semble écraser les êtres et surtout Itto. Elle part errer comme une âme en peine, en quête de sa place, de sa liberté. Au milieu de la nature, des événements qui surviennent, elle semble se retrouver. « C’est le parcours aussi d’une jeune femme qui va enlever les masques au fur et à mesure qu’elle avait pour finalement se dévoiler telle qu’elle est réellement« , estime la réalisatrice.

Le montage fluide happe le spectateur dans une ambiance onirique. Au huis clos de la famille riche et guindée, s’oppose la grandeur du monde, vaste, mystérieux. Aux plans serrés qui suggèrent l’oppression, succèdent des plans larges qui restituent l’immensité de l’environnement. Un territoire où les animaux, le ciel, l’univers incitent à l’humilité des hommes qui se croient puissants. « C’est un film qui va peu à peu vers le dépouillement, notamment à l’image. Les premières et dernières images du film incarnent l’évolution de ce qui se perd et ce qui se gagne à travers cette crise qu’affrontent mes personnages« , relève la cinéaste, usant d’un choc pour remettre les choses à leur place, gagner en humanité.

 

Lire la suite sur le site africine.org

Author: Michel Amarger

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