LM Fiction de Hicham Ayouch, Maroc / France, 2022
Sortie France : 16 août 2023
Dist : Urban Distribution
Le cinéma du Maroc est riche de comédies populaires qui s’appuient sur les travers de la société pour distraire. Hicham Ayouch apporte sa contribution à ce courant avec Abdelinho, une fiction dévoilée au Festival de Marrakech 2022. Cette production franco marocaine est à l’image du cinéaste, né à Paris d’un père marocain, qui navigue entre les deux pays. Il s’est rôdé à la télévision en France comme journaliste, avant de réaliser des films institutionnels au Maroc après 2004.
Il signe des documentaire, Les reines du Roi, 2005, sur le statut de la femme, Poussières d’ange, 2007, sur des sportifs handicapés mentaux, puis s’oriente vers la fiction avec Tizaoul (Les arêtes du cœur), 2006, écrit avec Hisham Lasri et Abdellah Abalou. Remarqué avec Fissures, 2009, où un trio s’entrechoque à Tanger, il s’impose avec Fièvres, 2013, Grand prix du Fespaco 2015, sur la relation d’un père avec son fils dans une cité en France, et revient au Maroc pour un clin d’œil au Brésil avec Abdelinho.
Abdelinho, de son surnom, vit dans une petite ville du Maroc où il arbore les couleurs du Brésil. Son travail de fonctionnaire dans un bureau lugubre où il traite le courrier, avec son collègue qui fantasme sur des revues dénudées, est assez déprimant. Mais Abdelinho s’évade en exhibant une passion immodérée pour la culture du Brésil, sa samba qu’il enseigne à des jeunes femmes du quartier, et son amour pour Maria, l’héroïne d’une télénovela qu’il regarde dans sa chambre perchée. Résistant à sa mère qui voudrait marier son seul fils parmi ses quatre filles, Abdelinho refuse les avances d’une jolie collègue car il ne vibre que pour Maria, élue députée et confrontée à un promoteur corrompu.
Sa mère regarde à la télé les émissions d’un évangéliste star des pays arabes, Amr Taleb, qui sélectionne des candidats à problèmes pour les sauver. La mère attire son attention sur le cas d’Abdelinho. Businessman avisé et cupide, le prédicateur y voit l’occasion de discréditer les télénovelas où évolue Maria. Le jour de l’émission, Abdelinho le ridiculise en direct. Amr Taleb s’emploie alors à occuper la ville avec ses acolytes pour imposer ses idées rigoristes. Il soudoie les proches d’Abdelinho tandis que ce dernier communique désormais avec Maria à travers l’écran de télé. Elle se bat contre le promoteur agressif. Leurs victoires pourraient sceller une union au-delà des frontières.
« C’est l’histoire d’un jeune Marocain qui vit à Azemmour, et sa passion c’est le Brésil. Il est fou amoureux de ce pays, le Brésil, il porte des habits brésiliens, il danse la samba avec les gens de son quartier« , résume Hicham Ayouch en livrant une comédie où les caractères sont typés. Les décors qu’il a conçus servent à créer un univers visuel coloré et fluo où s’agitent les personnages. Abdelinho est un homme rêveur et décidé, Maria est une star de télé, belle et engagée pour le peuple.
Autour d’eux, le collègue de bureau est obsédé par ses conquêtes et sa virilité, une des employées convoite le Brésilien qui ne la regarde pas tandis que la mère, autoritaire et opportuniste, joue sa partition. En face, l’évangéliste véreux, qui cherche le profit et le pouvoir, incarne les forces négatives. Le propos vise à pointer les manipulations de ceux qui prétendent agir pour la religion. Mais Abdelinho tient surtout par une galerie de portraits bien interprétés par Abderrahim Tamini, Inês Monteiro, Ali Suliman, Said Bey, Zohr Simani.